Retraites : le pire n’est pas une fatalité

Par Pierre Kerdraon

 

Les nombreuses manifestations organisées dans toute la France le 1er février par l’ensemble des syndicats et le succès qu’elles ont rencontré montrent que les français ne sont pas prêts à « se laisser faire » sur leurs retraites.

 

A l’heure où d’aucuns parlent de supprimer l’impôt de solidarité sur la fortune (dixit Nicolas Dupont-Aignan, pourtant considéré par certains comme un « bon républicain » de droite), où le gouvernement multiplie les gestes en faveur de la fraction la plus rétrograde du patronat, le projet du gouvernement sur les retraites consiste à dire aux salariés « vous devez travailler plus longtemps pour gagner moins ».

 

Derrière la culpabilisation orchestrée des fonctionnaires accusés d’être favorisés par rapport aux salariés du privé se cache en réalité une réforme qui touchera tous les salariés, en application des décisions prises au Conseil Européen de Barcelone en 2001 qui prévoyaient entre autres de repousser de 5 ans l’âge de départ à la retraite (Chirac et Jospin ayant signé un texte en ce sens au nom de la France).

 

Afin de dresser les salariés  du privé contre ceux du public, on oublie de dire qu’à ancienneté et salaire égaux, la plupart des fonctionnaires sont encore défavorisés par rapport aux salariés du privé malgré les mesures qui ont frappé ces derniers en 1993 et en 1996 (allongement de la durée de cotisation pour atteindre 40 ans et retraite reposant sur le salaire moyen des 25 meilleures années au lieu des 6 derniers mois comme c’est encore le cas pour les fonctionnaires).

 

Le projet du gouvernement, même si Jean Pierre Raffarin a été discret sur ce point dans son discours du 3 février au Conseil Economique et Social, vise aussi à réinstaller les fonds de pension gelés en 1997 par le gouvernement de Lionel Jospin (avant d’être réinstallés  en douceur sous forme d’épargne salariale en février 2001 , la loi créant les fonds de pension étant elle-même abrogée par le Parlement en janvier 2002).

Rappelons que les fonds de pension sont constitués par une cotisation volontaire et individuelle de chaque salarié sur un fonds côté généralement en bourse alors que la retraite par répartition repose sur la cotisation obligatoire et collective des employeurs et des salariés dont le produit est immédiatement reversé aux retraités.

 

Ce système des fonds de pension qui sert avant tout les intérêts des plus riches et allège les charges des entreprises a pourtant montré sa nocivité : les salariés d’Enron aux Etats-Unis en savent quelque chose, eux dont la retraite est partie en fumée lors de la faillite de leur entreprise et de l’éclatement de la bulle boursière.

 

Pour notre part sans nier le fait que l’évolution démographique et l’allongement de la durée de la vie impose des mesures pour préserver l’équilibre actifs/retraités à l’horizon 2020/2040, nous ne croyons pas à ces recettes miracles.

La vérité c’est que des mesures peuvent être prises pour sauvegarder nos retraites d’aujourd’hui et de demain sans remettre en cause les acquis de dizaines d’années de luttes sociales.

 

La priorité est d’inverser la tendance qui existe depuis trente ans : les richesses nationales produites doivent cesser d’aller de moins en moins aux salariés et de plus en plus aux revenus de la bourse. Revaloriser le travail c’est d’abord cela ! Vouloir sauver notre niveau de retraites et uniformiser le système vers le haut passe par là ! Des salaires plus hauts se sont des cotisations plus élevées !

 

Cela doit être lié à une politique de l’emploi volontariste d’augmenter le nombre de cotisants . Pour cela l’Etat français doit renouer avec son rôle de planification et de développement de notre tissu industriel et la France se doit de peser de toutes ses forces pour qu’une politique de relance économique ait lieu à l’échelle européenne. N’en déplaise à nos penseurs libéraux : augmenter le nombre de cotisants c’est à dire créer des emplois est plus que jamais une priorité nationale. Un chômeur en moins c’est un cotisant de plus !

Mais d’autres mesures doivent être rapidement prises.

Mesure de justice d’abord en permettant à ceux qui ont travaillé depuis 40 ans de prendre leur retraite à taux plein immédiatement sans attendre d’avoir 60 ans.

Mesure de bon sens ensuite en pénalisant les entreprises qui débauchent leurs salariés de plus de 50 ans dans le seul but de réduire leur masse salariale et d’augmenter le profit de leurs actionnaires.Mesure de bon sens encore en développant une véritable politique familiale, non pas par la mise en place d’un salaire maternel qui ressemble fort au slogan « les femmes à la maison » mais par la construction de crèches, de logements sociaux, d’équipements permettant aux femmes de concilier vie professionnelle et procréation. A titre d’exemple le simple passage d’un taux de fécondité de 1,9 à 2,1 permettrait d’alléger de 10% les besoins de financement pour les retraites d’ici 2040.

Mesure plus globale enfin en développant une politique résolument tournée vers la croissance et l’emploi en France mais aussi en Europe : soutien à la recherche et à la production, soutien aux investissements, réorientation de l’épargne des ménages vers le logement social grâce à une politique incitative, pénalisation des licenciements boursiers, sauvegarde des services publics.

Autant de pistes susceptibles d’être exploitées par un gouvernement soucieux de préparer l’avenir et de prendre en compte l’aspiration de nos concitoyens au progrès social.

 

L’impôt de solidarité sur la fortune ou comment augmenter la fortune en catimini.

par Jean Marc Gayraud

 

Sous prétexte de préserver l'emploi et de renforcer " l'attractivité " de la France,  le gouvernement RAFFARIN s'apprête de nouveau à faire un cadeau fiscal à la France " d'en haut " à défaut de céder aux partisans de la suppression pure et simple de cet impôt . Ceci n'aura pas lieu dans le cadre du débat sur la loi de finances mais par le biais de dispositions sur l'initiative économique(courageux..). Il est bon de rappeler que l'ISF est un  impôt déclaratif et que les biens sont évalués par le contribuable lui même.  Par ailleurs, l'assiette de l'impôt souffre de nombreuses exonérations puisqu'elle n'est pas composée de l'ensemble des biens du contribuable. En sont exclus notamment les biens professionnels, au rang desquels figurent déjà les droits sociaux. Le dispositif actuel exonère, sous certaines conditions, les parts ou actions détenues dans les sociétés par leurs dirigeants. Sans changements fondamentaux dans son assiette et avec un taux marginal de 1,8%, cet impôt progressif a vu  le nombre de ses redevables et son rendement augmenter. De peur d'être accusé de privilégier les plus grosses fortunes et ne souhaitant pas lancer sur la place publique un vrai débat sur la fiscalité et la place de l'impôt en France, le gouvernement agit sur une partie de la base de l’ISF. Les mesures annoncées permettraient d'exonérer les actionnaires minoritaires. Elargir le champ d'exonération des biens professionnels à ces droits sociaux au nom de la sauvegarde de l'emploi est une atteinte à la solidarité et à la cohésion sociale : un rappel utile, 9 millions de français sont aujourd'hui bénéficiaires de la prime pour l'emploi. Désormais l’ISF qui impose les millionnaires mais très peu les milliardaires ne touchera pratiquement plus que les patrimoines immobiliers, laissant de côté les parts sociales. La France est-elle attractive, pour " ceux d'en haut " ? Il semble, au vu du nombre de redevables de l'ISF partis à l'étranger (environ 350, soit 0,2% des contribuables concernés ... ) ,  que la réponse soit oui.  A l'heure où les plans sociaux s'amoncellent, ce nouveau cadeau fiscal à peine déguisé au profit des plus privilégiés ne présage rien de bon et surtout pas une plus juste répartition des recettes ni un meilleur système fiscal. Allez Messieurs RAFFARIN, MER et SEILLIERE, encore un petit effort, et ceux " d'en haut " vous en seront éternellement reconnaissants…  

 

Grands projets d’infrastructures de Transport

 

PAR Jacques DURON

SGA UNSA Cheminots

 

Le rapport d’Audit sur les grands projets d’infrastructures de Transport de février 2003 ne répond pas aux exigences d’une véritable politique multimodale des Transports à la veille de l’ouverture à la concurrence en particulier dans le secteur ferroviaire.

L’UNSA Transport est convaincue que le débat parlementaire de mai prochain confirmera la tendance initiée par le rapport, consolidé par l’étude prospective de la DATAR et le rapport sur le fret ferroviaire français, des deux sénateurs HAENEL et GERBAUD. Au passage, il nous semble essentiel de pointer du doigt, le rapport concernant l’Etat actionnaire et le gouvernement des entreprises publiques qui a pour but de dédier à l’APE (Agence des participations de l’Etat) le rôle de gestionnaire délégué. Le flicage des entreprises publiques est en marche avec l’exclusion programmée des représentants des personnels au sein des conseils d’administration.

 

Le délai d’environ 20 ans qui sépare la décision de la réalisation effective des projets d’infrastructures met en évidence le retard accumulé par les Pouvoirs Publics en matière de prospective sur l’évolution des besoins en infrastructures pour répondre efficacement aux orientations du « Livre Blanc » de septembre 2001.

Sachant que les infrastructures terrestres n’ont pas vocation de devenir des niches financières d’une nouvelle économie virtuelle, il nous semble illusoire de pouvoir convaincre les investisseurs privés pour pallier le désengagement de l’Etat. Le projet de décentralisation du pouvoir dans les régions aggrave encore la situation à l’heure où l’Etat devrait renforcer la place de la France à la veille de l’élargissement européen.

Les salariés du Transport sont en état de légitime défense, face au peu d’intérêt consacré aux modes les moins polluants. Le recul sur le canal Seine-Nord, sur le projet d’écluse fluviale du Havre Port 2000, sur la liaison Lyon-Turin correspond  à une politique à courte vue. « Le coup de grâce » est donné à la SNCF  et à VNF au profit d’un lobby routier très ancré dans l’esprit des politiques. Le système ferroviaire reste le parent pauvre du développement durable.

Le postulat est clair :

F0DE               Le fluvial qui n’a plus de marge d’autofinancement peut attendre.

F0DE               Le principe de développement du réseau ferré basé sur l’endettement est désormais limité. La régénération du réseau classique à la SNCF contribuerait à aggraver une impasse financière existante. Seule la grande vitesse attire les convoitises capitalistiques.

Le Rail et le Fluvial sont deux modes, dont la complémentarité est avérée, ils sont les parents pauvres des orientations présentes et à venir, ils doivent attendre une hypothétique embellie économique. Tous les financements publics sont désormais proscrits.

Pour le secteur routier, « les coups sont partis », la redevance domaniale kilométrique répond en partie à l’égalité de traitement en matière de redevance d’usage des infrastructures que nous souhaitons depuis longtemps, même si l’internalisation des coûts externes n’est pas d’actualité. Pour le reste, la théorie développée dans ce rapport est suspendue à la capacité contributive de l’usager, à l’impôt régional des contribuables et aux péages urbains.

Même si les schémas de services prévoient la mise en œuvre d’une politique de rééquilibrage modal, les solutions pour atteindre les objectifs sont loin d’être lisibles et convaincantes.

L’UNSA Transport  constate que tous ces rapports sont des recueils de bonnes intentions teintées d’une volonté de moins en moins déguisée de lancer l’offensive des privatisations.

La nouvelle bataille du rail version sénatoriale sonne le glas de l’entreprise intégrée de service public.

 

 

 

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