LES AMERICAINS VICTIMES DE LA MONDIALISATION LIBERALE
L’Amérique,
c’est la puissance qui paraît invulnérable, c’est la guerre en Irak pour
le contrôle des réserves de pétrole, c’est les fonds de pension, les
multinationales qui sèment le chômage dans le monde entier, c’est les
déficits payés par les autres peuples, c’est le viol des règles
internationales, c’est un luxe insolent qui s’étale dans les magazines
« people ».
L’Amérique
c’est cela, mais ce n’est pas que cela. Il suffit de s’installer à un fast
food à 2 pas de la plus riche avenue du monde, la 5ème avenue,
pour voir les SDF se succéder, fouillant la même poubelle les uns après
les autres, dormant sur des cartons dans des encoignures de porte, même
par – 10 °. Et s’il n’y a plus guère de SDF sur la 5ème avenue,
c’est uniquement parce que l’ancien maire de New York, Rudolph Guliani,
(le « héros « du 11 septembre) les a chassés plus loin car ils donnaient
« une mauvaise image « aux touristes.
Les 30
GLORIEUSES AMERICAINES
La crise
économique des années 30, malgré le New Deal de Roosevelt, n’a été
véritablement surmontée qu’avec la guerre. De 1947 à 1972 le pouvoir
d’achat a doublé. Les salariés américains (notamment les blancs), grâce à
la puissance des Etats Unis à l’issue de la guerre et grâce à la puissance
de leurs syndicats ont pu négocier des augmentations de salaire, une
échelle mobile en dépit du Maccartysme et de la loi Taft – hartley.
C’est vers
1970 que le niveau de vie des américains a atteint son pic.
Puis LA
BAISSE DU POUVOIR D’ACHAT
Mais depuis
1970 les salaires ont fortement baissé. Nombre de négociations syndicales
se sont conclues avec des augmentations de salaire inférieures à
l’inflation, voire nulles. Parfois les syndicats ont accepté des baisses
de salaire en échange de « garanties sur l’emploi » (Il n’y a pas qu’en
France ou en Allemagne, chez Siemens, Bosch ou Perrier qu’on a fait ce
chantage et qu’il y a eu ce type d’accords). Le résultat est que le
pouvoir d’achat a chuté et qu’en 1997 un travailleur sur 4 avait au moins
2 emplois.
Pour freiner
la chute de leur niveau de vie les familles se sont endettées.
La
désyndicalisation a été parallèle : de 34 % dans les années 50, le taux de
syndicalisation est tombé à 27 % en 1975. Mais depuis la chute s’est
accélérée : en 2001 il n’y a plus que 13,5 % de syndiqués (40 % dans le
secteur public, moins de 10 % dans le privé). Notons que ce sont les
salariés hommes noirs qui sont le plus syndiqués.
10 MILLIONS d’AMERICAINS SANS
EMPLOI
Le secteur
manufacturier qui était le 1er en 1990 est devenu le 3ème.
Depuis l’élection de G Bush en 2000, plus de 2,7 millions d’emplois
industriels ont été perdus. Il y a maintenant 10 millions d’américains
sans emploi. Non seulement la reprise ne résout pas le problème du chômage
qui a augmenté d’1 million depuis 2001, mais bien souvent les emplois
créés le sont à des salaires et protection sociale inférieurs.
Les
MARCHES COMMUNS AMERICAINS
La
désindustrialisation, les délocalisations, la mise en concurrence des
salariés avec des pays à main d’œuvre moins chère, comme la Chine, …
sévissent en Amérique tout autant que dans l’Europe de Maastricht.
Les USA
souhaitent imposer un marché commun de toute l’Amérique.
Il y a 3
traités : le NAFTA déjà en vigueur (USA, Canada, Mexique),
Le CAFTA (Amérique centrale), et l’ALENA (toute l’Amérique).
- Les effet
du NAFTA (traité de libre échange USA, Canada, Mexique)
Depuis des décennies il y a une forte immigration aux USA, notamment en
provenance du Mexique. Ces immigrants subissaient des conditions de
travail très dures, mais survivaient. Mais maintenant grâce au NAFTA, il y
a encore moins cher au Mexique. Ces immigrants arrivés jeunes il y a 20
ou 30 ans n’ont plus de travail aux Etats Unis, ni de moyen de retourner
au Mexique. Les salariés des Etats Unis peuvent se faire du souci, mais ne
n’est pas pour autant que les salariés mexicains : bien au contraire ils
sont sous le contrôle des multinationales, et seront licenciés à la 1ère
occasion : il y a les milices privées, tellement de misère qu’on peut
toujours trouver un remplaçant…L’appauvrissement des uns n’est pas
l’enrichissement des autres.
D’ailleurs depuis le NAFTA les salaires mexicains ont baissé eux aussi
L’AFL –
CIO contre les marchés communs américains, contre l’OMC :
La puissante
Confédération américaine AFL - CIO estime que 880 000 emplois ont été
perdus aux USA à cause du NAFTA , que les salaires ont baissé au Mexique.
Elle considère que le CAFTA et l’ALENA auraient des effets multipliés par
10.
A la
différence de la CES qui fait campagne pour le OUI à la Constitution, l’AFL
– CIO, prend nettement position contre ces marchés communs destructeurs
d’emplois, et notamment d’emplois qualifiés. L’AFL – CIO a également
condamné la suppression des quotas sur le textile, en vigueur depuis le 1er
janvier, qui menace 70 % de marché américain
Les syndicats et peuples
d’Amérique Centrale et d’Amérique du sud se mobilisent aussi :
En Amérique
Centrale, en Amérique du sud les syndicats, les peuples, se sont aussi
mobilisés contre le CAFTA et l’ALENA, pour défendre les secteurs
nationalisés contre les multinationales (Venezuela, Brésil, Bolivie…)
L’EMPLOI
PUBLIC
Les médias
donnent l’impression que l’emploi public est quasi inexistant aux Etats
Unis. La réalité est différente : l’emploi public a fortement progressé
jusqu’en 1970 ( 20% du total des emplois). Personne ne s’étonnera que sous
Reagan la part du public a diminué, mais il a encore baissé davantage sous
…Clinton . Cependant le secteur public représentait en 2000 encore 1
salarié sur 6 (19 millions, un accroissement de 2 millions depuis 1988).
Remarque : on n’entend
guère « Sarko l’ américain » ou Madelin citer ces chiffres. Au contraire
ils laissent entendre que seule la France a créé des emplois publics dans
les dernières décennies, ce qui pour eux est censé être la preuve
irréfutable qu’il faut se débarrasser des fonctionnaires. C’est faux. Mais
ce qui est commun, c’est l’hostilité des gouvernements US ou français, de
Bruxelles, vis à vis du secteur public et nationalisé
LES
INEGALITES
Inégalité
devant le chômage
On sait que
l’Amérique est le pays où plus grandes fortunes et des SDF, des « working
poors » (salariés qui travaillent et sont néanmoins pauvres)
Le chômage
est inégalement réparti. Ainsi en 2000 les statistiques officielles
montrent :
%
chômage |
HOMMES |
FEMMES |
|
16 à 19
ans |
20 ans
et plus |
16 à 19
ans |
20 ans
et plus |
Blancs
Non
blancs |
12,3
23,9 |
2,8
5,9 |
10,4
20,8 |
3,1
5,6 |
Inégalité
devant les ressources :
- En 2000 20
% des familles ayant les revenus les plus élevés = possèdent 50 % du
Revenu National. Les 5% les + plus riches ont plus de 20 %
-
La pauvreté se développe : En 2003 il y a
près de 36 MILLIONS DE PAUVRES, une augmentation de 1,3 millions en 1 an.
-
Inégalité devant la maladie, la retraite
ou l’école (voir plus loin)
LES
DEFICITS EXPLOSENT
Le tableau ci
dessous montre le solde du Budget. Les dépenses pour la guerre en Irak, la
sécurité intérieure …atteignent des sommets, alors que les dépenses
sociales souffrent de nouvelles coupes. Ainsi pour 2005 le Budget de la
défense augmente de 7 %, le Budget de la sécurité intérieure de 10 %, le
reste de 0,5 % seulement soit moins que l’inflation. Le Budget 2005 de
Bush est clairement anti social.
|
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
Solde
du Budget (milliards dollars) |
- 164 |
- 108 |
- 22 |
+ 69 |
+ 126 |
+ 236 |
+ 127 |
- 158 |
- 375 |
- 520
(estimation) |
Quant à la
balance des paiements, son déficit n’est pas moins imposant : 530
milliards de dollars en 2003, plus de 600 en 2004
Remarques :
- Le dogme de la baisse
d’impôts. C’est sous les années Reagan qu’a été mise en pratique la
« théorie » selon laquelle en diminuant les impôts et en augmentant les
dépenses militaires on réduirait le déficit du Budget.Entre autres les
impôts des sociétés sont passés de 46 à 34 % ( F Mitterrand a d’ailleurs
agi de même). Cette théorie s’est traduite par …une envolée du déficit. De
70 milliards de dollars en 1980 et 1981, le déficit est passé à 221
milliards de dollars en 1984 (5 % du PIB). On aura reconnu dans cette
théorie la politique de Bush, mais aussi de Seillière, Chirac, Sarkozy, et
bien entendu de Bruxelles.
- Pourtant si Bush était en
Europe son Budget serait refusé par Bruxelles. Si Bush était en Afrique,
son Budget serait refusé par le FMI et la Banque Mondiale, cloué au pilori
par l’OCDE. Mais personne n’a de sanction à proposer contre les Etats
Unis. D’une part en raison de leur puissance, d’autre part parce qu’un
plan d’ajustement comme en Afrique entraînerait le monde entier dans la
crise : la dette est si importante que les Etats Unis tiennent leurs
créanciers.
- La chute du dollar est
cependant préoccupante. Certes personne n’a intérêt à son effondrement.
Mais l’affaiblissement du dollar pénalise les pays qui en détiennent des
montants importants et qui voient leurs avoirs fondre comme neige au
soleil. Il suffirait qu’un ou quelques uns vendent, d’un mouvement de
panique, pour entraîner la catastrophe
LES
LIBERTES ROGNEES
Les Etats
Unis sont traditionnellement un pays de liberté et de démocratie.
L’attentat contre le World Trade Center est utilisé par l’administration
Bush pour justifier auprès de l’opinion publique toutes les mesures
sécuritaires. Petit à petit les libertés sont rognées, y compris le
pouvoir du Parlement (Fast Track). La pratique de la torture s’étend
(Guantanamo, Irak).
LA
PROTECTION SOCIALE, COUTEUSE, INEGALITAIRE ET EN CRISE
La protection
sociale est un scandale national depuis des années. Elle a d’ailleurs été
au centre de la récente campagne électorale. Aux Etats Unis l’assurance
maladie est largement privatisée (du moins ce qui est rentable).
C’est donc
avant tout un marché destiné à servir des profits.
La
protection sociale US est extrêmement coûteuse environ 15 % du PIB, plus
de 50 % de plus que la France, pour une efficacité bien moindre et
bien sûr fort inégalitaire.
Comment un américain est-il
assuré ( ou pas assuré du tout) ?
La majorité
des américains (60%) sont assurés au travers de leur entreprise, ce qui
entraîne qu’en cas de perte d’emploi on perd aussi l’assurance maladie ou
la retraite. Les salariés du secteur public sont couverts à 87 %. Quant au
privé, la tendance est à la baisse rapide : comme en France, en Allemagne
ou en Italie, les employeurs américains jugent les charges sociales
insupportables. Les entreprises cotisent de moins en moins, voire plus du
tout.
Sources de financement de la couverture maladie en 2003
Sources |
En
millions de personnes |
En % |
Assurance privée volontaire |
197,8 |
68,6 |
Dont :
entreprises |
174 |
60,4 |
individus |
26,5 |
9,2 |
Dispositifs publics |
76,8 |
26,6 |
Dont :
Medicare |
39,5 |
13,7 |
Medicaid |
35,6 |
12,4 |
Population assurée |
243,3 |
84,4 |
Population non assurée |
45 |
15,6 |
Population résidente |
288,3 |
100 |
Source : IRES.
Note : certains assurés peuvent appartenir à plusieurs catégories
45
millions d’américains n’ont aucune couverture sociale, la plupart de
moins de 65 ans. (70 % d’ente eux ont pourtant un salarié en activité dans
la famille)
Plus de 20
millions d’autres ont une couverture partielle et insuffisante :
Medicare et medicaid
- Medicare s’adresse aux
personnes âgées et handicapées
- Medicaid est une assurance
pour les pauvres. Elle est financée conjointement par l’Etat fédéral et
les Etats. L’éligibilité et les remboursements dépendent de la situation
financière et des priorités des Etats.
Remarque : ce qu’on appellerait la régionalisation est une source
d’inégalité supplémentaire aux USA. Toute ressemblance avec des réformes
en cours en France …
Les coûts de gestion de
l’assurance privée : le dogme et la réalité
Le dogme
répété sans relâche et sur tous les tons affirme que le privé est beaucoup
plus efficace et moins cher que le nationalisé. Pourtant la multiplication
des intervenants, la concurrence, la nécessité de dépenser de gigantesques
budgets en publicité et autres coûts commerciaux, se traduit par des coûts
infiniment plus élevés.
Aux USA
les coûts de gestion ont augmenté de 12 % par an pendant 32 ans :
|
1970 |
2002 |
1970 - 2002 |
|
Mds $ |
% |
Mds $ |
% |
Accroissement moyen |
Dépenses d’administration et coût net de l’assurance privée |
2,8 |
3,8 |
104,9 |
6,8 |
12 %
|
Le Managed Care : économies,
médecin référent et filières de soins
Dans les
années 70 pour répondre à l’augmentation des coûts de l’assurance maladie,
les compagnies d’assurance ont mis en place un système de contrôle des
soins, le Managed care.
Au centre du
Managed care on rencontre les médecins référent, les filières de soin, le
contrôle des choix thérapeutiques…Le Managed Care n’est pas sans rappeler
Douste Blazy, ou les différentes réformes en Europe qui s’accélèrent
depuis que les dépenses sociales sont incluses dans le Pacte de stabilité.
Les
américains, autant que faire se peut, se détournent de la contrainte que
représente le médecin référent, veulent le libre choix du spécialiste, et
s’affilient majoritairement à ceux qui n’ont pas cet impératif.
Après une
décélération de courte durée, la croissance des coûts a repris de plus
belle.
Les réformes
en cours ou en projet
- La réforme
de Medicare : à l’approche de la campagne électorale Bush a tenté
d’améliorer la prise en charge de medicare. C’est un échec : beaucoup
d’argent donné au privé, peu aux patients, complexité des filières de soin
auquel les assurés ne comprennent rien et en conséquence ne s’affilient
pas. La crise de la protection sociale US a en fait augmenté.
- Les retraites : la dernière
proposition de G Bush consiste à individualiser davantage les retraites
dans des comptes individuels investis en actions ou obligations. Les
salariés US sont invités à jouer leur retraite en bourse.
- Dans les années à venir la
protection sociale va coûter encore plus cher (les engagements se comptent
en centaines de milliards de dollars supplémentaires), mais les bénéfices
pour une grande proportion des américains reste plus qu’incertains. C’est
le résultat d’une gestion déjà fortement privatisée, éclatée, dont la part
du privé s’accroît
EDUCATION
Bien
évidemment l’enseignement est inégalitaire et hors de prix. Ainsi c’est
très officiellement qu’on conseille aux jeunes parents de faire des
économies longtemps à l’avance pour pouvoir payer les études de leurs
enfants au lycée. Quant aux écoles de renommée mondiale (Harvard, MIT ,
Berkeley, ..), leur coût est carrément astronomique.
LES 2
AMERIQUES
Les Etats
Unis sont la puissance dominante. Ils ont la capacité de s’attribuer de
gré ou de force une forte proportion des marchés mondiaux. Leurs richesses
sont incommensurables.
Mais les USA
sont aussi le pays de l’inégalité, et d’une inégalité croissante : les
délocalisations s’accélèrent, le chômage croit, le pouvoir d’achat baisse,
la protection sociale est inexistante ou insuffisante pour des dizaines
de millions d’américains. Les recettes libérales qui sévissent partout
frappent aussi une majorité de la population américaine. Et en plus ils
ont à supporter le poids de la guerre contre « le mal » au Budget
gigantesque.
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