Réduction du temps de travail  décret du 2 mars 1848

 

Le 2 mars 1848, en France, un décret du gouvernement provisoire de la 2ème République réduit d'une heure la journée de travail parce que, selon ses termes, «un travail manuel trop prolongé non seulement ruine la santé mais en l’empêchant de cultiver son intelligence porte atteinte à la dignité de l’homme».

La journée de travail tombe à... dix heures à Paris et à onze en province.

Mais en avril 1848 est élue à l'Assemblée une majorité de députés issue de la bourgeoisie de province. Elle voit d'un mauvais oeil les réformes sociales et ne craint pas de massacrer des milliers d'ouvriers lors des journées dramatiques de juin.

La rupture est dès lors consommée entre la République et la classe ouvrière et le décret sur la journée de dix heures, jugé trop généreux, est abrogé le 9 septembre 1848.

 

Le 1er  mai. Fête du travail

 

C'est au cours du 4ème congrès de l’American Federation of Labor, en 1884 que les principaux syndicats ouvriers des États-Unis s'étaient donnés deux ans pour imposer aux patrons  une limitation de la journée de travail à huit heures.

Ils avaient choisi de débuter leur action un 1er mai parce que beaucoup d'entreprises américaines entamaient ce jour-là leur année comptable.

Le 1er mai 1886, la pression syndicale permet à environ 200.000 travailleurs des Etats Unis d'obtenir la journée de huit heures.

Mais d'autres, moins chanceux, au nombre d'environ 340.000, doivent faire grève pour forcer leur employeur à céder.

Le 3 mai, une manifestation fait trois morts parmi les grévistes de la société McCormick Harvester, à Chicago.

Une marche de protestation a lieu le lendemain et dans la soirée, tandis que la manifestation se disperse à Haymarket Square, il ne reste plus que 200 manifestants face à autant de policiers.

C'est alors qu'une bombe explose devant les forces de l'ordre. Elle fait une quinzaine de morts dans les rangs de la police.

Trois syndicalistes anarchistes sont jugés et condamnés à la prison à perpétuité. Cinq autres sont pendus le 11 novembre 1886 malgré des preuves incertaines.

Trois ans après le drame de Chicago, la 2ème  Internationale socialiste réunit à Paris son deuxième congrès. Celui-ci se tient au 42, rue Rochechouart, salle des Fantaisies parisiennes, pendant l'Exposition universelle qui commémore le centenaire de la Révolution française.

Les congressistes se donnent pour objectif la journée de huit heures (soit 48 heures hebdomadaires, le dimanche seul étant chômé). Jusque-là, il est habituel de travailler dix ou douze heures par jour (en 1848, en France, un décret réduisant à 10 heures la durée de la journée de travail n'a pas résisté plus de quelques mois à la pression patronale).

Le 20 juin 1889, sur une proposition de Raymond Lavigne, ils décident qu’il sera «organisé une grande manifestation à date fixe de manière que dans tous les pays et dans toutes les villes à la fois, le même jour convenu, les travailleurs mettent les pouvoirs publics en demeure de réduire légalement à huit heures la journée de travail et d’appliquer les autres résolutions du congrès. Attendu qu’une semblable manifestation a été déjà décidée pour le 1er mai 1890 par l’AFL, cette date est adoptée pour la manifestation.»

Le 1er mai 1891, à Fourmies, une petite ville du nord de la France, la manifestation rituelle tourne au drame. La troupe équipée des nouveaux fusils Lebel et Chassepot tire à bout portant sur la foule pacifique des ouvriers. Elle fait dix morts dont 8 de moins de 21 ans. L'une des victimes, l'ouvrière Marie Blondeau, habillée de blanc et les bras couverts de fleurs, devient le symbole de cette journée.

Quelques mois plus tard, à Bruxelles, l'Internationale socialiste renouvelle le caractère revendicatif et international du 1er mai.

 

Le 1er  mai en France

 

 

En France, dès 1890, les manifestants du 1er mai ont pris l'habitude de défiler en portant à la boutonnière un triangle rouge. Celui-ci symbolise la division de la journée en trois parties égales: travail, sommeil, loisirs.

Le triangle est quelques années plus tard remplacé par la fleur d'églantine. En 1907, à Paris, le muguet, symbole du printemps en Île-de-France, remplace cette dernière. Le brin de muguet est porté à la boutonnière avec un ruban rouge

Le 23 avril 1919, le Sénat français ratifie la journée de huit heures et fait du 1er mai suivant, à titre exceptionnel, une journée chômée.

Les manifestations du 1er mai 1936 prennent une résonance particulière car elles surviennent deux jours avant le deuxième tour des élections législatives qui vont consacrer la victoire du Front populaire et porter à la tête du gouvernement français le leader socialiste Léon Blum.

Paradoxe! C'est pendant l'occupation allemande, le 24 avril 1941, que le 1er mai est officiellement désigné comme la Fête du Travail et de la Concorde sociale et devient chômé.

Cette mesure est destinée à rallier les ouvriers au régime de Vichy. Son initiative revient à René Belin. Il s'agit d'un ancien dirigeant de l'aile anticommuniste de la CGT qui est devenu secrétaire d'État au Travail dans le gouvernement du maréchal Pétain.

En avril 1947, la mesure est reprise par le gouvernement issu de la Libération. Celui-ci fait du 1er  mai un jour férié et payé.

 

Histoire du syndicalisme à travers notre histoire

 

La révolution de 1789 a modifié considérablement la société française. Elle a introduit un changement fondamental en faisant du citoyen la source du droit, le fondement du pouvoir étant désormais la volonté du peuple exprimée dans les élections, mais en matière sociale, l’effet est négatif malgré le décret du 21 août 1790 stipulant « les citoyens ont le droit de s’assembler et de former entre eux des société libre ». Mais hanté par le souvenir des corporations dont les règlements minutieux empêchaient toute innovation technique, les législateurs s’opposent à toute organisation établissant des rapports entre salariés et patrons. Ce sera la loi Le Chapelier voté le 14 juin 1791. Cette loi interdit aux citoyens d’un même état ou profession de former des associations ni de faire des conventions tendant à n’accorder qu’à un prix déterminé le cours de leur industries ou de leurs travaux. Ces interdictions furent aggravées par les lois de Germinal an XI, et confirmé par les articles 414,415 et 416 du code pénal.

Dans son délibéré en séance publique, à Paris le 2 mai 1864 le corps législatif a adopté le projet de loi dont la teneur suit :

 

Article 1er

Les articles 414, 415 et 416 du code pénal sont abrogés. Ils sont remplacés par les articles suivants :

 

Article 414.Sera puni d’un emprisonnement de six jours à trois ans et d’une amende de 16 francs à 3000 francs, ou de l’une de ces 2 peines seulement quiconque, à l’aide de violence, voies de fait, menaces ou manœuvres frauduleuses, sera amené ou maintenu,, tenté d’amener ou de maintenir une cessation concertée de travail dans le but de forcer la hausse ou la baisse des salaires ou de porter atteinte au libre exercice de l’industrie ou du travail.

 

Article 415. Lorsque les faits punis par l’article précédent auront été commis par suite d’un plan concerté, les coupables pourront être mis, par l’arrêt ou le jugement, sous la surveillance de la haute police pendant 2 ans au moins ou 5 ans au plus.

 

Article 416. Seront punis d’emprisonnement de 6 jours à 3 mois et d’une amende de 16 francs à 300 francs, ou de l’une de ces deux peines seulement, tous ouvriers, patrons et entrepreneurs d’ouvrage qui, à l’aide d’amendes, défenses, proscriptions, interdictions prononcées par suite d’un plan concerté, auront porté atteinte au libre exercice de l’industrie ou du travail.

 

Article 2

Les articles 414, 415 et 416 ci dessus sont applicables aux propriétaires et fermiers ainsi qu’aux moissonneurs, domestiques et ouvriers de la campagne.

Les articles 19 et 20 du titre II de la loi des 28 septembre et 6 octobre 1791 sont abrogés.

 

Cette loi même si elle atténuait la loi Le Chapelier était encore très restrictive mais devait par la suite faciliter l’action ouvrière. Il faudra attendre la loi du 13 mars 1884 pour que les syndicats soient reconnus.

 

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